Les faits. S’il est avéré que dans le cadre de l’achat de 24 Rafale le Qatar a obtenu pour sa compagnie nationale Qatar Airways des droits de trafic supplémentaires vers Lyon et Nice, cette décision risque d’être bien plus pénalisante pour Emirates que pour Air France.
Décryptage. Emirates opère un vol quotidien vers Nice et 5 fois par semaine vers Lyon. La ligne Dubaï-Nice, ouverte en 1994, est à l’équilibre grâce à un mix passagers/fret. Emirates détient aujourd’hui une part de marché estimée à 55-60% du fret avionné, mais il lui a fallu près de 9 ans pour rentabiliser cette ligne régulière. Et, selon un familier de l’économie locale, le marché du fret avionné en région PACA n’est pas extensible. La ligne Dubaï-Lyon, ouverte en novembre 2011, est pénalisée parce qu’elle n’est pas quotidienne. Récemment, des élus et des chefs d’entreprise de la région lyonnaise ont pris position pour que ce vol devienne quotidien. L’arrivée de Qatar Airways avec trois vols par semaine risque de fragiliser sérieusement l’équilibre économique de ces deux routes d’autant que la compagnie qatarie n’hésite pas à casser les prix. De plus, la compagnie du Qatar dispose déjà de droits de trafic sur des villes de province, des droits non exploités à ce jour, qui s’ajouteront à d’éventuels nouveaux droits. Air France, pour sa part, s’est toujours refusée à ouvrir des lignes internationales au départ des villes de province, d’une part pour protéger son hub de Roissy-CDG, et d’autre part, parce que la compagnie française a toujours estimé qu’il n’y avait pas suffisamment de trafic (passagers et fret) pour exploiter ne serait-ce qu’un Lyon-New York de manière régulière dans des conditions économiques viables. Au contraire de la Grande-Bretagne et de l’Allemagne, deux pays très décentralisés, le hub de Roissy-CDG domine le marché aérien français. Les échecs successifs d’American Airlines, puis de Delta Airlines au départ de Lyon vers les Etats-Unis lui ont donné raison. Delta exploite seulement une ligne saisonnière Nice-New-York. Les gestionnaires d’aéroports de province sont eux persuadés du contraire.
B.L.