L’industrie du transport aérien a bon espoir de relancer ses activités si la situation sanitaire poursuit son amélioration au niveau mondial. Déjà, les marchés domestiques chinois et américains sont presque aux niveaux de 2019. Le marché européen devrait lui aussi connaître une embellie. Après les marchés domestiques, les compagnies aériennes attendent avec impatience de remettre en vol leurs avions long-courriers stockés depuis plusieurs mois. Cette remise en vol sera progressive et exige des procédures particulières.
Trois questions à Pierre Vellay, président de New&next consulting, ancien directeur de la flotte d’Air France-KLM .
Comment remet-on en service une flotte d’avions après trois mois d’inactivité ?
Les compagnies sont malheureusement habituées à stocker des avions et elles ont donc une série de procédures qui sont encadrées réglementairement selon la durée de stockage des aéronefs. S’il s’agit de quelques semaines, les procédures sont assez légères. En revanche, pour des périodes courant sur quelques mois, on entretient les avions durant cette durée afin qu’ils puissent être remis en service le plus rapidement possible. Pour les stockages de longue durée on démonte les pièces à péremption, les moteurs sont déposés et stockés mais dans ce cas il s’agit d’une procédure lourde. Puis, une fois décidée, la remise en vol l’avion subira une visite de déstockage. Dans la situation actuelle, les avions sont l’objet de visites de stockage parce que l’on estime qu’une partie de ces avions vont être remis en service, ou par obligation contractuelle pour les avions loués, par contre, une grande partie des flottes d’avions actuelles ne reprendra pas du service dans un avenir proche et les appareils seront placés en stockage de longue durée, soit en vue d’une réactivation, soit en attendant une vente ou un démantellement en Europe ou aux Etats-Unis, avec ou sans convoyage selon le lieu de stockage.
Trois mois au parking, un avion risque-t-il de se détériorer ?
Non, l’avion ne risque pas de dommages particuliers parce qu’il y a des protections effectuées justement pour le protéger (intempéries, poussières, etc.), cela concerne en particulier les entrées d’air afin de protéger la cabine et les systèmes. Sur les avions modernes, et en particulier les bimoteurs destinés à effectuer des vols de longue durée dits ETOPS, tous les équipements ont vu leur fiabilité renforcée dès l’origine avec des systèmes de tests intégrés qui donnent des informations en permanence sur leur état. Aujourd’hui, sur un avion moderne, toute l’électronique embarquée s’autoteste ! Les avions modernes, court-courrier ou long-courrier, sont donc moins sujets à de mauvaises surprises que les appareils d’ancienne génération. Traditionnellement, les services de maintenance effectuent ce que l’on appelle des « points fixes », qui consistent à remettre en service certains systèmes actifs de l’avion. Par exemple, il faut déplacer régulièrement un avion de quelques mètres afin de soulager les pneumatiques. Tout ce qui touche aux fluides est vérifié et renouvelé, les réservoirs sont ventilés. Enfin, une fois les vérifications faites, équivalentes à une daily check pour un stockage court, il ne faudra que quelques heures pour remettre en service un appareil stocké depuis le mois de mars, par exemple. Toutefois, la remise en vol technique se fera plus rapidement que commercialement…
Les moteurs sont des points de maintenance prioritaires ?
Les moteurs doivent tourner pour éviter une corrosion liée à l’environnement extérieur, cela n’a pas de conséquences lourdes mais la performance peut être légèrement dégradée. L’autre raison pour laquelle on fait tourner les moteurs est importante : il s’agit d’éviter le phénomène de fluage c’est-à-dire que lorsqu’on laisse deux pièces mécaniques en contact il y en a une qui prend la forme de l’autre… C’est très progressif et cela intervient sur les pneumatiques comme sur les pièces en acier.