Les Boeing 787 Drealliner interdits de vol, une décision rare

Une interdiction mondiale de vol (Consigne de Navigabilité Urgente) a été lancée sur décision américaine à l’encontre de tous les Boeing 787, après une série exceptionnelle d’incidents, des mesures d’autant plus rudes que les investigations en cours sur les batteries pourraient exiger des semaines. La flotte d’une cinquantaine de Boeing 787 (dont 24 exploités par les compagnies japonaises) est ainsi immobilisée sine die. «C’est une décision rare», a déclaré à l’AFP un porte-parole de l’Agence européenne de la sûreté aérienne (AESA), soulignant que seul le pays de fabrication de l’appareil est habilité à prendre cette mesure au niveau mondial.

Rappel des faits. L’Agence fédérale américaine de l’aviation (FAA) a décidé de lancer une enquête de fond sur la sécurité du Boeing 787, après plusieurs incidents survenus à bord du nouvel appareil de Boeing. Cette enquête se concentrera sur le système électrique du Dreamliner et sur les mesures de contrôle de qualité utilisées dans la fabrication de l’avion. Une série d’incidents est survenue ces dernières semaines (fuites, problèmes de freins…) et il devenait urgent que les autorités américaines décident «quelque chose» pour empêcher les rumeurs de prendre le dessus. Cette décision a été prise après un début d’incendie survenu à Boston à bord d’un 787 de JAL, après son atterrissage en provenance du Japon. Les passagers avaient déjà débarqué quand le feu a démarré mais la FAA avait ordonné dans la foulée l’inspection immédiate de tous les 787 en service pour vérifier que certaines pièces étaient correctement assemblées.
Analyse. L’avion «tout électrique» est-il remis en cause ? Les enquêteurs de la FAA vont revoir en profondeur le processus de certification du système électrique très développé et très sophistiqué du 787 afin de couper court à ces mauvaises nouvelles qui ternissent la réputation du 787, de Boeing et de la FAA. Il faut savoir s’il s’agit d’un problème de jeunesse facilement réparable concernant un avion très innovant ou si l’on est face à un véritable problème de conception.
Le 787 illustre ce l’on appelle l’avion «tout électrique», c’est une innovation majeure pour les équipementiers et les avionneurs mais comme toute avancée technologique, il y a souvent des problèmes de maturité à régler, notamment en ce qui concerne les batteries au lithium utilisées sur le 787. La puissance électrique restituée est de l’ordre d’1mégawatt… Peut-être y-a-t-il eu un enthousiasme prématuré pour le tout électrique et le tout plastique pour alléger la masse de l’avion et optimiser sa consommation de kérosène. En tout cas, il y a désormais un vrai challenge à relever pour Boeing et ses partenaires industriels pour que la réputation du 787 ne soit pas durablement ternie.

Le 787 ne se comporte pas plus mal que le 777, selon Boeing

Les divers problèmes plus ou moins sérieux émaillant la mise en service opérationnelle du Dreamliner mais aussi de l’A380 rappellent avec insistance que tout programme aéronautique civil est loin d’être une sinécure. Comme pour l’A380, les premiers 787 ont été refaits « à la main ». Evidemment, cela surprend, mais c’est normal. Si au début des années 2000, certains ont cru que l’industrie aéronautique avait atteint une maturité lui permettant de s’émanciper de certaines contraintes lourdes qui ralentissent les processus de production, il n’en n’est rien. L’an dernier, Boeing a livré 46 B787 après 3 appareils en 2011. «Comme pour tout nouveau programme, des problèmes surviennent au cours de la première ou des deux premières années d’exploitation. Par rapport à la même période de mise en service du 777, nous sommes dans une situation similaire en termes de fiabilité, d’entretien et de disponibilité des avions. Dans une large mesure, le 787 se comporte de la même façon que le 777 au moment de son entrée en service. Et je peux dire que les performances de ces deux avions, le 787 et le 777, sont supérieures à celles de tout autre gros porteur entré en service au sein des flottes du monde entier», assurait la semaine dernière Mike Sinnett, vice-président et ingénieur en chef du programme 787.

787 : la participation des principaux équipementiers français

Labinal (Safran) produit tout le système d’interconnexions électriques et réalise des études d’ingénierie ainsi que du support sur site, Messier-Bugatti-Dowty fournit les systèmes de freinage électrique et les trains d’atterrissage avant et principaux ; Radiall a conçut des systèmes d’interconnexion entre différents systèmes critiques, Thales fournit le système de conversion de puissance électrique et les batteries Lithium-ion de dernière génération fabriquées par la société japonaise GS Yuasa, l’afficheur de vol intégré donnant les paramètres de navigation et le système de divertissements de bord (IFE), les sociétés du Groupe Zodiac Aerospace fournissent de nombreux équipements : toboggans d’évacuation, masques à oxygène des pilotes, distribution électrique primaire, écrans et claviers du cockpit, balais d’essuie-glace, leviers de train d’atterrissage, aménagement intérieur et système de gestion des eaux usées et de traitement des déchets.

Note
La FAA a donné son feu vert pour des vols ETOPS (Extended-range Twin-engine Operation Performance Standards) en 787 à 180 minutes en attendant d’étendre cette autorisation à 330 minutes. Le 787 est un appareil destiné à ouvrir de nouvelles routes sur de longues distances ne justifiant pas l’exploitation d’un 777 ou d’un avion de type 747 ou A380. La certification ETOPS 330 mn est donc un avantage concurrentiel clé pour le 787 qui lui poserait des problèmes commerciaux si cette dérogation lui était retirée, notamment pour les liaisons trans-Pacifiques.

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A propos aerodefensenews

Bruno Lancesseur est rédacteur en chef la lettre AeroDefenseNews.net Pour nous contacter envoyez votre adresse mail à aerodefensenews@gmail.com
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